samedi 13 avril 2013

Clédones du jour : Socrate, production, enregistrement, consommation, individu, âme atomique


Voici les titres du matin sur la page des nouveautés philosophiques Amazon :
(1) L'autre Socrate, étude sur les écrits socratiques de Xénophon
(5) L'âme atomique : pour une esthétique d'ère nucléaire

Autant de mots fortuits que je prends comme clédones du jour, propositions des dieux.

(1) Pour moi, l'autre Socrate, c'est forcément plutôt Badiou, la Maquerelle du vrai ! Mais alors il n'a rien à voir avec le personnage de Xénophon. C'est plutôt l'image du peintre David, reprise dans la frise de couverture de sa République de Platon, quand Badiou se glisse entièrement dans la peau de Socrate.

(2) Vie, capital, aliénation. Ce triplet marxiste, j'ai envie de l'associer tout de suite au triplet de la production désirante, au début de l'Anti-Oedipe, production de productiond'enregistrementde consommation. Car la production de production, c'est la vie même ; la production d'enregistrement en appelle à une analogie avec le Capital (et par extension avec les deux autres grandes formes historiques du socius, la Terre et le Despote). Quant à la production de consommation, certes elle peut mal tourner, rabattue sur les identifications familiales, mais elle coïncide aussi avec une schizophrénie positive, la grâce des devenirs et des conjonctions, voyages, passages, "Tous les noms de l'histoire, c'est moi !" Aliénation n'est alors plus le bon mot, car l'aliéné n'est pas celui qu'on croit.

(3) Le pire qui arrive au désir, lit-on dans le plateau n°6, celui de l'Oeuf dogon, ce n'est pas exactement sa réification, mais de tomber aux mains des prêtres. Triple malédiction sur le désir, magnifique paragraphe au ton nietzschéen. "Tourné vers le nord, le prêtre a dit : Désir est manque ... Puis, tourné vers le sud, le prêtre a rapporté le désir au plaisir .... Puis, tourné vers l'est : Jouissance est impossible, mais l'impossible jouissance est inscrite dans le désir ... Le prêtre ne s'était pas tourné vers l'ouest ... C'est pourtant là que le désir était tapi, l'ouest était le plus court chemin de l'est, et des autres directions redécouvertes."

(4) On ne confondra pas l'individu avec l'individuation. Ce qui est très important, au Bois-Clinique, ce sont les facteurs individuants ; ils sont les dynamismes de l'individuation et de la dramatisation des concepts.
L'individu, c'est plutôt une question logique. La question leibnizienne d'une série de prédicats ou événements qui définissent un individu. Nous sommes renvoyés à la très dense "genèse statique du langage", séries 14 à 17 de Logique du sens. Pour voir comment Deleuze dérive bien de Leibniz sa théorie de l'individu et de la personne (ne pas confondre), comparer aux chapitres 4 et 5 de son Leibniz (Le pli).
Alors, des "incertitudes sur l'individu" ? Forcément, puisque l'individu est moins réel, sans doute, que les prédicats ou singularités impersonnelles qui le définissent logiquement (du côté de la genèse statique ou transcendantale), et que les  facteurs pré-individuels qui le produisent physiquement (du côté de la genèse dynamique ou de l'individuation proprement dite).

(5) Là, il y aurait trop à dire - le couple Schérer-Hocquenghem ! Il est évident que leur "atomique" entre en dialogue raisonné avec le "moléculaire" de leur ami Guattari. Avec ce livre, L'âme atomique, nous sommes chez nous, au Bois-Clinique. Schérer, quand on l'a forcé à se taire sur le désir et la pédagogie, a logé sa propre pensée dans des hommages à Deleuze et à Guattari.
Son apparition fortuite sur Amazon au premier jour de ce blog est un signe des dieux, de Zeus hospitalier en personne ? Bénédiction.